Dans la conclusion de son livre "Y-a-t-il (vraiment) des technologies de l'information ?" ( JEANNERET Yves.Y-a-t-il (vraiment) des technologies de l'information ?. Villeneuve d'Ascq, France : Presses Universitaires du Septentrion, 2007, 200p (Les savoirs mieux)), Yves Jeanneret invite à "lutter contre une certaine contamination terminologique du discours de recherche par le discours promotionnel". Cette invite me paraît tout particulièrement s'appliquer à l'usage irraisonné du terme « dématérialisation ». Si le terme, qui a l'avantage de faire image, peut sans dommage s'appliquer à des procédures identifiées et circonscrites que peuvent être les déclarations de revenus, les soumissions à des marchés publics, il est d'un usage moins heureux lorsqu'on tente de l'appliquer aux processus beaucoup plus complexes qui conduisent à la rédaction d'écrits professionnels assistés par les technologies de l'information dans le secteur sanitaire et social. Par contamination sémantique la risque de « dématérialiser l'humain » risque d'apparaître, aux yeux des professionnels, éducateurs, enseignants, psychologues, médecins comme une perspective effrayante.
L'histoire des sciences de l'information nous enseigne, à tout le moins, que, jamais, un média ne s'est substitué à un autre la radio n'a pas tué le livre, la télévision n'a pas tué la radio pas plus que le cinéma, Internet n'a pas tué la télévision.... Ce qui est en cause est, bien plutôt, l'intégration de ces différents médias. Lorsque nous proposons aux professionnels de recourir, pour leurs écrits, aux technologies de l'information que sont, non seulement, les outils de traitement de textes mais plus largement les outils de gestion de contenus (CMS – Content Management System) via des logiciels de Gestion de dossiers individuels informatisés, nous les invitons à entrer dans l'univers particulier de l' « écrit d'écran » qui, est, comme l'exprime Yves jeanneret « Lire, écrire et un peu davantage ». Pratiquer l'écrit d'écran c'est se soumettre aux contraintes de l'architexte, celles qui résultent des trames imposées, des champs de formulaires, des limites en nombre de signes, etc. mais c'est aussi se voir offrir la possibilité d'une appropriation large de l'espace médiatique, de la manipulation incessante du texte, de l'ajout d'objets multimédias.
L'enjeu c'est de parvenir à ne pas faire de l'écrit d'écran et des médias informatisés un monde à part mais de parvenir à les introduire dans la diversité et la complexité de la culture professionnelle, sans prétendre les faire se substituer aux autres formes d'expression. L'important n'est pas, ici, de raisonner en termes de techniques ou fonctionnalités mais en terme de rôle dévolu à l'écriture. Dès lors l'écran devient indissociable du brouillon, du carnet, du post-it, de la chemise, du dossier, du cahier, du document punaisé au tableau d'affichage .... C'est dans cet espace que les acteurs du Système d'Information doivent déployer leurs analyses.
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